Eclats de foi par l'abbé Casanave
Les femmes et les disciples qui ont constaté le tombeau vide et qui ont éprouvé la présence du Christ ressuscité ont-ils entonné aussitôt l’Alléluia comme nous le faisons dès le jour de Pâques ? Certainement pas ! Les récits des apparitions nous parlent de témoins en proie au trouble et au doute, oscillant entre l’effroi et la peur. Jean et Luc dénichent toutefois un rayon de joie lors d’une apparition de Jésus, mais il ne semble pas assez lumineux pour emporter l’adhésion générale. L’Alléluia attendra.
Ces jours-ci, deux « disciples » en chemin, eux aussi, croisent un prêtre. Ils s’interrogent. Le premier se passionne pour les dernières conclusions de l’historien Petitfils au sujet du saint Suaire de Turin. D’après l’écrivain, les dernières études scientifiques sur le sujet prouveraient l’authenticité du linceul.
Le second pèlerin, de formation scientifique, s’est attaqué à la lecture de « Dieu, la science, les preuves » de Bolloré et Bonnassies. Ces auteurs renouent avec les « disputationes » des théologiens sur les preuves de l’existence de Dieu. Des générations de séminaristes se souviennent avoir transpiré sur celle de Saint Anselme, appelée « la preuve ontologique » et sur celles de St Thomas d’Aquin au nombre de cinq !
Ne boudons pas notre plaisir ! Reconnaissons tout d’abord l’apport de la connaissance scientifique qui explore l’infinie complexité de l’univers, qui sonde l’infiniment grand et l’infiniment petit. Elle peut parfois frôler la question du pourquoi et nous aider à déblayer un chemin vers Dieu.
Devant l’enthousiasme des « pèlerins » pour ces nouvelles certitudes, le prêtre s’est trouvé dans le même embarras que celui des apôtres après le compte rendu des femmes du tombeau.
Premier obstacle de taille à l’Alléluia : peut-on enfermer Dieu dans une équation ou dans la logique d’un raisonnement humain ? Le doute est permis. De plus, le Dieu de l’Evangile répugne à s’imposer aux hommes par la force de l’évidence. Il paraît au contraire très respectueux de notre liberté. Jésus laisse repartir le jeune homme riche sans insister ! Il renonce aux arguments frappants de Pierre lors de son arrestation.
La résurrection prouvée, resterait la question de l’identité du personnage en question : « Serait-ce son fantôme ? » Reconnaître Jésus n’a pas été évident pour ses familiers. Il a fallu que Jean pousse du coude Pierre et lui souffle : « C’est le Seigneur » pour que le patron de la pêche se jette à l’eau !
Une fois l’identité certifiée, qui nous dit que ce ressuscité est le Fils de Dieu ? Encore faut-il se rappeler de ce qu’il a dit à son sujet : « Mon Père est moi nous sommes UN. » Mais pour accorder un crédit à ces paroles, nous devons faire confiance à celui qui les prononce comme à ceux qui les rapportent.
Et le prêtre de conclure : « Mes amis, pour ma part, parmi tous les fondateurs de religions, je fais confiance à Jésus car il me révèle un Dieu à l’envers de tout ce que les hommes pouvaient imaginer « en matière » de divinité. Un Dieu non pas surpuissant, mais « sur-aimant », au point de se livrer entre nos mains. Personne n’avait jamais prévu un tel Dieu !
Et je fais confiance aux premiers rapporteurs de la Bonne Nouvelle parce qu’ils n’étaient ni des intellectuels jonglant avec les idées, ni des politiques cherchant l’adhésion du peuple, ni des farfelus ou des mystiques déjantés. Les premiers témoins étaient des pêcheurs, des paysans, des gens du peuple auxquels on ne faisait pas prendre des vessies pour des lanternes.
Et merci à tous celles et ceux qui, depuis plus de 2000 ans, nous démontrent par leurs travaux que la Foi n’est ni une aberration ni une défaite de la raison et nous aident à déboulonner les idoles que nous ne cessons de fabriquer ! »