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Homélie du 25 dimanche de l'année B - 22 septembre

par l'abbé Gad Aïna

Frères et sœurs dans le Christ,

 

Je suis partagé entre une méditation de l’Évangile ou de la première lecture ou de la seconde lecture. On peut les saisir globalement dans le thème du complot.
La première lecture présente la présence dérangeante du croyant qui doit s’assumer face à l’adversité qu’engendre son modus vivendi. La deuxième situe la source des conflits ou des complots avec les autres, notre être obturé par l’orgueil et la jalousie.

 

Cependant, je vous invite à méditer sur l’Évangile.

 

L’Évangile nous plonge dans la trame des méditations précédentes, en l’occurrence celle du dimanche dernier. Beaucoup, en effet, ont pu s’interroger sur l’attitude de Jésus vis-à-vis de Pierre : le fameux vade retro satana « arrière satan » ! Et pour preuve, ce dimanche ni lui ni les onze autres n’avaient rien perçu du message de Jésus à Césarée. 

 

Jésus descend donc de Césarée vers Jérusalem et va de place en place, en Galilée, terre où il a grandi. Saint Marc nous rappelle qu’il était occupé à instruire les disciples sans pour autant préciser le sujet abordé.
Il détaille ensuite un enseignement : le Maître leur parle de sa trahison, de sa mort et de sa résurrection. Mais les disciples ne comprennent pas, ne posent pas de question, de plus ils ont peur de lui demander !

 

Quelle est cette gêne à interroger pour avoir des réponses ? Quelle est cette pudeur de son ignorance que l’on devrait cultiver au point de se tromper sur la personne que l’on suit, sa nature, sa mission et les implications pour soi ? Ces questions, je les pose à haute voix que nous puissions rechercher Jésus et les réponses à notre foi que nous n’avons pas et au sujet desquelles nous avons sans doute et occasionnellement un silence coupable pour ne rien demander.

 

Ainsi les disciples de Jésus ne tentèrent-ils rien pour savoir un peu plus sur la leçon du jour.
Ils ont toutefois une réaction paradoxale : ils se sont disputés entre eux pour savoir qui était le plus grand. Ils ont donc échangé sur le fait, puis ils ont remarqué leurs différences de point de vue, et puis ils se sont concentrés sur l’après Jésus. Une alternative s’impose : Qui serait le plus grand si Jésus messie, reconnu comme tel par Pierre venait à manifester sa gloire ? Ou alors qui serait le plus grand si Jésus messie tel présenté par lui-même venait à mourir ?

 

Dans les deux options de cette alternative, nous percevons bien qu’il urgeait pour les disciples de Jésus d’inventer une organisation dans laquelle bien-sûr chacun a sa place, dans laquelle bien sûr il est question de positionner tel ou tel, dans laquelle bien sûr il faudrait convenir du plus grand… et puis ils se sont disputés…… Quant à Jésus, devant eux, il avançait.
Nous voyons bien le maître dans sa lancée, et ceux qui le suivent plutôt dans leurs pensées.

 

Pour vous faire toucher du doigt le drame, je vous conte une histoire : une dame riche et directrice d’une entreprise, avait élevé seule sa fille unique avec tout son amour. Epuisée par une maladie grave qui s’était acharnée sur elle et sans répit, elle avait fini par se rendre compte de l’inévitable sur le point d’arriver. Sentant donc sa mort prochaine, elle fit venir sa petite adorée et lui avoua le cancer qu’elle lui avait caché, révéla par le même fait comment elle avait voulu la protéger tant elle l’aimait. Pour finir, elle reconnut qu’elle s’était, tout au long de son existence, dédiée à son entreprise pour satisfaire sa fille et qu’elle regrettait ne pas avoir eu beaucoup plus de temps avec elle, alors qu’elle allait quitter ce monde. La fille prenant la parole lui demande directement si elle avait convenablement mis tous les documents à son nom et de suite se leva pour aller finaliser les papiers à la banque et sécuriser les autres biens et voir avec les associés comment maintenir son nouveau poste de Directrice. Aussitôt, elle s’était levée et déjà elle était partie. Une tragédie ! Sans amour, sans affection, sans humanité. Préférence de l’avoir et du pouvoir sur les valeurs de la vie et de la famille ! 

 

Voilà le drame de Jésus. Pour régler cette situation nonobstant les peines produites par cette conduite, Jésus attend d’arriver dans le calme de la maison, ensuite, après s’être enquis du sujet, bien qu’il le maîtrisât, donne une autre leçon.
La réplique de Jésus développe deux points différents : la question de savoir qui est le plus grand et l’accueil de Jésus en la personne des petits. 

Jésus répond d’abord à la première question : celui qui veut être le premier, qu’il se fasse le serviteur de tous. La première place ne se dispute pas. On ne l’arrache pas par la force ni par la ruse ni la rage. Elle est une victoire sur soi, une bataille que l’on gagne en se mettant au rang du dernier, en rivalisant d’amour et d’ardeur pour la foi et l’Évangile. Jésus insiste sur le caractère indispensable du véritable “serviteur” du Royaume. Nous ne sommes pas propriétaires des services et des engagements que nous acceptons ou que nous prenons dans l’Église comme dans le monde. Nous sommes serviteurs, implique que d’autres enfants de Dieu doivent rendre le même service et c’est aussi à nous de les associer. Parfois un grand investissement sans charité peut empêcher les timides de nous soutenir et de nous aider ou même qu’ils utiliseraient cela comme alibi ou prétexte. C’est un devoir commun, une charte pour tous. Chacun doit servir, aider chacun ! Et servir en ne croyant pas que nous ayons inventé le rôle que nous assumons.

 

Ensuite, lorsqu’il fait venir un enfant, il l’embrasse pour démontrer non seulement l’affection mais surtout pour montrer que l’important n’est pas le rang de celui qu’on reçoit, mais le fait qu’on accueille en sa personne le Christ et son Père. Accueillir en chaque personne le Christ et son Père, nous fait recevoir l’autre en tant qu’une offrande de Dieu, une diversité qui ne dispute pas de place, une opportunité qui n’envahit pas. Nous devenons donc enfant pour accueillir sans distinction, et nous accueillons les autres comme des enfants c’est-à-dire comme des pages vierges et non avec nos casiers, nos schémas accusateurs ou réducteurs. S’accueillir les uns les autres sans distinction, d’après le don de Dieu. Devenir un enfant, et accueillir l’autre comme un enfant avec soi dans le Royaume de Dieu…

 

 

Puisse Dieu nous en accorder la grâce ! 

 

 


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