par l'abbé Gad Aïna
Frères et sœurs dans le Christ,
Les textes de ce dimanche ont pour thème le mariage chrétien avec le dessein de Dieu aux origines, puis non seulement son aspect sacré indiqué par Jésus mais aussi son allure juridique. Je voudrais relire les textes dans une autre perspective, à cause des échecs des mariages, des séparations dévastatrices avec blessures profondes et permanentes.
[De plus c’est la rentrée pastorale avec après les agapes fraternelles.]
Je propose donc ma méditation à partir d’un mot « endurcissement ». Le Pape Jean-Paul II disait dans Dominum et vivificantem n° 47 :
« L'action de l'Esprit de vérité, qui tend à la «mise en lumière du péché» pour le salut, se heurte, dans l'homme qui se trouve en une […] situation [d’enfermement], à une résistance intérieure, presque une impénétrabilité de la conscience, un état d'âme que l'on dirait durci en raison d'un libre choix: c'est ce que la Sainte Ecriture appelle «l'endurcissement du cœur ».
Dans l’évangile de Marc, Jésus avant de guérir l’homme à la main sèche avait promené son regard indigné et même temps affligé de l’endurcissement du cœur de son entourage (Mc 3,5).
Pour nous éclairer toujours, nous pouvons lire dans le Psaume 80, au verset 13 la plainte de Dieu et sa lassitude vis-à-vis de son peuple :
« Je l'ai livré à son cœur endurci : qu'il aille et suive ses vues ! »
L’endurcissement ou le cœur dur est la fermeture de toute la réalité intérieure d’une personne. J’y établis mon point de départ car justement Jésus fustige en l’indiquant comme la cause de la volonté de chasser son conjoint, de le quitter ou plutôt de pratiquer l’adultère en restant sur place, ou encore en restant juxtaposés sans être véritablement ensemble. Ma méditation à partir d’ici nous pousse à comprendre donc que l’autre est une bénédiction, le conjoint est une bénédiction, la famille est une bénédiction, les enfants sont une bénédiction.
La première lecture en nous incitant à revisiter les origines, nous rappelle que l’homme, comme la femme, est un projet de Dieu. Dieu est leur auteur et tous deux sont de la même matière. Percevoir la bonté de Dieu en tout être permet, en un premier pas, de nous retenir loin de l’endurcissement du cœur. De ce fait, dans le dessein de Dieu, la femme comme l’homme sont bons. Dans son projet, ils sont l’un pour l’autre une aide qui corresponde. Dans le plan divin, à la faveur de la rencontre de l’homme et de la femme, jaillit le dialogue alors même qu’ils sont inconnus l’un de l’autre. Un dialogue bienveillant qui aboutit en des paroles enthousiasmantes : « tu es l’os de mes os, la chair de ma chair » ! De cette extase naît l’amour puisqu’Adam voit une soif comblée, non d’abord le sexe mais un bien-être, une communauté de vie et d’amour contraire à la solitude, et à l’absence d’altérité.
Je disais donc que mes propos n’annulent pas les déboires ni les déceptions de certains mariages. Câblons sur la Parole de Dieu et son enseignement plutôt. L’autre qui devient conjoint est d’abord une chance. Ce regard positif engage surtout à demeurer pareillement une chance pour les autres. La deuxième lecture nous affirme que Jésus notre grand-prêtre est un honneur, une gloire parce qu’il a accepté de souffrir pour tous, pour donner à Dieu à des fils. C’est le Fils Unique qui donne une multitude de fils à son Père. Par sa passion et sa mort, dit l’Epître aux Hébreux, il n’est plus qu’un avec eux, ils sont de la même race et pour cette raison, tout Dieu qu’il soit, il n’a pas honte de les appeler ses frères.
Pour cette année pastorale, nous sommes appelés donc à laisser tous les racismes et toutes les exclusions et à percevoir, l’autre, proche ou étranger comme une opportunité, une bénédiction, un frère, une sœur, un autre nous-mêmes, l’os et la chair de nous-mêmes.
Je vous assurais déjà que la famille est une bénédiction. Le psaume responsorial de cette liturgie (80) nous le rappelle « ta femme dans ta maison est une vigne généreuse et tes fils autour de la table comme des plants d’olivier. »
Ce psaume célèbre la famille qui a pris conscience de sa mission. Par sa seule existence, sa vie saine et sa joie simple, elle inflige une brûlure à tous ceux qui se sont laissé mener par les appels à posséder et à jouir.
Que ferait-on sans le vin et l’huile ? La famille est plus que le vin et l’huile. L’image est à méditer et approfondir : la vigne et l’olivier voilà la richesse. Frères et sœurs, ce n’est pas du beurre car Dieu donne des noix mais il ne casse pas ! La seule conscience de la bonté ne suffit pas ! La responsabilité, l’entretien, le travail, la préservation d’un art permettent d’obtenir du bon vin et de la bonne huile.
Ne sommes-nous pas la famille de Dieu, son peuple, ceux dont le Fils unique a fait ses fils, cette famille des nations ?
Pour cette année, dans la synodalité, tous frères et dans l’espérance, nous avons à construire notre paroisse. Il s’agira simplement de prier tous les jours les uns pour les autres, de s’émerveiller à lire la Parole de Dieu, de venir souvent participer à la messe le dimanche et aussi en semaine quelques fois. Il s’agira de s’ouvrir à tous pour découvrir de nouveaux chemins et de les emprunter afin de manifester notre foi (Parcours Alpha ou Cléophas) et de s’associer, de fraterniser par des moments de convivialité. Voilà bien sûr des moyens d’aller à Jésus comme des enfants. Son geste nous rappelle et notre égalité à tous face à lui, et notre nécessaire comportement pour aller vers lui et vers tous les autres nos frères !
Bonne année pastorale à toute la paroisse !
Le Seigneur soit avec vous