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Homélie pour la Sainte Famille - année C 2024

par l'abbé Gad Aïna

Frères et sœurs dans le Christ,

 

En cette occasion de la Sainte Famille de Joseph Marie et Jésus, je voudrais avant tout propos, que nous ayons une pensée chacun pour sa famille, une pensée de gratitude pour ce qu’elles sont bonnes et nous ont porté, une pensée pieuse pour celles qui traversent des difficultés depuis des années ou des générations. Je voudrais surtout vous remercier pour la famille que nous constituons ici sur cette paroisse, famille d’Eglise qui porte des personnes seules ou venues d’ailleurs comme moi. A tous bonne fête de la Sainte Famille.

 

En partant de la famille des enfants de Dieu qu’est l’Eglise, nous oublions souvent alors même que nous nous engageons à former nos frères et sœurs, nous oublions souvent qu’humainement parlant et mieux, spirituellement, c’est Dieu qui donne des enfants. Centrés sur nos projets et nos calculs, nous sommes désorientés à l’avènement de problèmes. La première lecture nous le rappelle. Dieu est la source de toute vie. D’abord celle du corps. Pour lui donner sa place, nous avons à nous adresser à lui : d’une part, les familles pour avoir des enfants et d’autre part, les moyens humains et financiers de les élever. Cet aplomb est également valable pour la communauté chrétienne. Anne a en effet demandé un fils au Seigneur. Dieu l’a exaucée ! Elle pouvait mais n’avait pas d’enfants. Prions Dieu de combler le désir de maternité de celles qui attendent un enfant et de donner fils et filles à l’Eglise.

 

Dieu qui est la source de la vie du corps est pareillement la source de la vie spirituelle. La raison est bien qu’il nous crée corps et esprit. Après la prière, j’aborde ici le devoir de donner la foi ou d’éduquer à la vie spirituelle. Beaucoup de parents s’imaginent que confier les enfants aux instituteurs ou aux catéchistes suffit. Les classes durent 24 heures par semaine. Le caté dure une heure et demie par semaine. La moitié du temps restant nous dormons. Ainsi plus de soixante-douze heures durant nos enfants sont libres, jouent et apprennent des choses que nous-mêmes ne comprenons ni n’analysons. Ne nous surprenons donc pas de certains résultats si nous n’accomplissons aucun effort réel pour transmettre un esprit. La société nous tourne tellement vers nous-mêmes, nos peurs, nos fatigues, que bien souvent, les enfants laissés à eux-mêmes grandissent comme ils peuvent. Je suis là encore au niveau de transmettre un esprit, un savoir-vivre, une vision de la vie.

 

La première lecture nous lance une autre tâche de croyant. Ce travail défie les concepts modernes de liberté, d’enfant-roi, de super protection emmitouflée d’anxiété. Ce devoir consiste à dépister avec son enfant sa vocation. Anne prend une responsabilité que la société moderne parfois schizophrénique laisse aux enfants. Parler de Dieu et inviter les enfants à servir Dieu. Dans un environnement déjà délétère, nocif, dommageable et préjudiciable, les chrétiens que nous sommes pratiquons une laïcisation à l’intérieur de l’Eglise : « euh l’enfant est libre hein ! Ben on doit le laisser choisir ! Et puis s’il affirme qu’il n’aime pas !

Qu’est-ce que je fais, moi ?!» Je reprends contre cette attitude des réponses qui existent avant que je ne naisse : alors faites de même pour l’alimentation, l’école, la piscine, le rugby etc… D’autres parmi vous murmurent en eux des réponses plus pertinentes que celle-là. On m’arguera tout de suite : « ah non monsieur l’abbé ce n’est guère la même chose ». Les familles transposent sur leurs enfants leurs problèmes et leurs incapacités. Elles préfèrent donner du temps, du divertissement, la télé ou un écran pour se fuir soi-même en se déresponsabilisant. Frères et sœurs dans le Christ donner la foi est un devoir de croyant, la République ne me dira pas l’inverse. Aider les enfants à découvrir une vocation chrétienne dans l’engagement avec des repères sûrs est un devoir parental. Aider les enfants à dépister et percevoir des lieux d’intérêts et développement personnel, économique ou social est une obligation des parents. Cette besogne est d’autant plus vraie en Eglise. Montrer la beauté de la liturgie et des services, s’engager et y faire goûter nos amis et nos enfants est la meilleure façon de transmettre la foi et la saveur succulente de la vie de foi. Je finis ce point en disant que tous, enfants comme adultes ou plus âgés nous agissons beaucoup par mimétisme.

 

Revenant à l’Evangile, nous nous rendons compte que Jésus aussi a appris par mimétisme. Ses parents lui ont transmis la foi et les pratiques juives. Son Père et sa mère l’ont éduqué à être le juif observant et critique qu’il est devenu. J’imagine mal la Vierge Marie dire à Jésus qu’il choisira une fois adulte ! Vous savez que certains enfants se plaignent que leurs parents ne leur ont jamais parlé de Dieu ! Et bien que l’Eglise soit dans l’environnement commun de toutes les communes de France, beaucoup d’enfants, quoique baptisés, grandissent sans jamais savoir ce qu’est une église, sans jamais y mettre le pied, sans savoir quelle attitude y tenir ; et là je n’évoque pas la question de Dieu sinon la connaissance de son milieu propre. Merci donc à Joseph et Marie qui ont conduit Jésus à Jérusalem. Ils ont donné le contexte que Jésus exploite pour affirmer être aux affaires de son Père céleste.

 

Pour finir cette méditation, mon dernier point abordera la correction dans la famille, une correction réciproque. De nos jours, on ne laisse plus les enfants, mais du temps de Jésus la caravane des femmes partaient avant celle des hommes car celle-là allait plus lentement. Donc, seulement après la journée de marche, les familles se retrouvent. Les deux parents de Jésus s’inquiètent de ne pas voir Jésus. Aujourd’hui les fugues des enfants doublées avec les enlèvements ravagent les parents. Jésus n’a pas tout à fait fugué ! Il n’a cependant pas suivi le mouvement collectif. J’imagine la peine d’abord et ensuite la colère de Joseph et Marie. Alors quand ils le voient dans le temple, le papa se tait. La maman parle : « Mon fils, pourquoi nous as-tu fait cela ? Ton père et moi nous te cherchions, très inquiets. » Luc nous entraîne vers un reproche qui amène à la découverte de la conscience de la mission de Jésus. Je voudrais m’arrêter simplement sur la nécessité de faire des reproches aux enfants et l’utilité qu’un parent se taise pendant que l’autre corrige. Marie savait que son enfant venait de Dieu, et qu’il sera appelé le Fils du Très-Haut. Elle lui fait quand même des reproches. Je perçois aussi cette conduite de reproche dans les deux sens. Jésus à son tour fait des reproches à ses parents : « Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne savez-vous pas que je dois être chez mon Père ? ». Luc ajoute qu’ils n’ont pas compris sa réponse. Là encore je ne fais pas de commentaire sur la qualité de la réponse ou des reproches. J’évoque la possibilité que les adultes, nous devrions avoir à nous éveiller aux remarques et aux reproches des enfants !

 

Prions donc frères et sœurs que la famille et l’Eglise soient le lieu d’éducation du corps, d’éducation de l’esprit, d’éducation à la foi. Prions que nos familles et nos communautés chrétiennes soient des lieux de partage, de dialogue et de correction fraternelle. Amen