par l'abbé Gad Aïna
Chers frères et sœurs dans le Christ,
Je voudrais au début de cette homélie vous proposer d’être comme les disciples dans l’évangile que nous venons d’écouter. En effet vous l’aurez remarqué, l’évangile parle de mariés dont les noms sont attendus mais ne viennent pas. Néanmoins, certaines personnes sont nommées en fonction de Jésus : sa mère, ses disciples. Je demande d’être comme les disciples pour deux raisons, j’ajouterai une troisième.
La première est bien sûr le lien à Jésus, le personnage principal invité à des noces. C’est lui aussi qui introduit aux mêmes noces. Être appelé en fonction de lui revient à saisir qu’il est non seulement le personnage central mais aussi qu’il est d’une la source de notre existence et d’autre part, venant de lui, nous sommes emportés dans son cortège qui nous projette dans la joie de la vie éternelle à ses côtés aux noces de l’Agneau.
La deuxième raison est qu’à la fin du passage, Saint Jean affirme que les disciples crurent en Jésus. Demeurer aux côtés de Jésus, assister à ces noces avec lui visent donc ce résultat notifié à la fin de l’évangile. Il serait alors singulier de finir la méditation de ce passage sans la croissance de notre foi, vu que c’est l’objectif final explicité par la présentation johannique.
La troisième raison pour être des disciples s’épanouit dans le lien avec les serviteurs qui sont désignés et non nommés. Dans la transposition, que j’opère tout à l’heure, ils sont les acteurs du puisage et du port du vin à la fête. Oui vous l’avez remarqué, nous entrons dans une célébration de noces et notre attitude de disciples nous sera utile pour percevoir adéquatement la scène. La construction du l’évangile, l’anonymat des acteurs et l’indication du signe suggèrent que Jésus est l’époux.
Lorsqu’on prend l’évangile, on se rend compte que les scènes sont en perspectives autour du centre, l’eau puisée sous le commandement de Jésus qui devient le vin qu’il donne. Le troisième jour du début est en lien avec la manifestation de la gloire à la fin. Cana en Galilée se retrouve au début et à la fin de la page. Jésus et sa mère d’un côté et de l’autre le majordome et le marié. La mère de Jésus qui parle avec assurance aux serviteurs en croisement avec le maître de banquet ou le majordome étonné qui parle aux serviteurs. Cette construction met Jésus au centre des noces, au cours desquelles il se comporte comme le véritable époux, il prend les choses en main, il offre le vin d’une abondance excessive plus de 600 litres de vin. Ce vin est en fait une eau dans des vases de purification qu’il transforme en vin meilleur. En fait ce passage de pierre nous renvoie à la première lecture.
Le prophète traduit sa hâte et son impatience. Non je ne me tairai pas. Non je n’aurai de cesse. Mais en fait c’est Dieu qui aime et qui est jaloux. Dans cette lutte ardente, incessante, il veut sauver Jérusalem. Il lui peine la réalisation de ce salut. Et là aussi, Dieu veut donner un nom nouveau, accorder une existence renouvelée c’est-à-dire un relèvement de sa situation d’exil, d’éloignement et d’humiliation. Le nom sortira de la bouche de Dieu. C’est sa Parole qui donnera une nouvelle existence. Isaïe poursuit en disant que Dieu qui fait justice à son peuple, fera de ce peuple un sujet de gloire et de victoire donc il écrasera ce qui l’effraie et le comblera. Ce peuple sera une couronne que Dieu mettra sur sa tête. C’est dire que Dieu lui fera voir son salut et qu’il fera de ce peuple un trophée. Voilà un Dieu qui aime et décide pour son peuple qu’il aime de le transformer en trophée qu’il portera pour montrer sa gloire et sa victoire. Mais l’expression renvoie également au diadème royal qu’on porte à la reine. Si Dieu fait voir son salut à son peuple, le prophète jaloux de son ami le Seigneur redit que ce peuple qu’il aura arrangé, Dieu l’embellira et en fera son épouse. La gloire a donc un répondant ; le salut se laisse percevoir de même que la victoire que Dieu s’offre pour se donner une épouse. L’Epouse est donc le peuple et Dieu est le véritable époux. Le prophète, qui organise, comme un majordome, se presse pour le bien des conjoints. « Comme un jeune homme se marie à une vierge, tes fils se marieront à toi ». Pour nous arrêter là, le décor du mariage est planté et le fils issu du peuple, l’Emmanuel, vient célébrer les épousailles avec le nouvel Israël.
Ces éléments nous éclairent davantage le texte de Saint Jean. Venons-en aux personnages. Certains sont actifs mais sans visages et d’autres nommés. Les actifs sont des figurants et en lien avec Jésus, les vrais sont les principaux acteurs. Les Apôtres inspirent les traits des serviteurs. En effet ils sont autour de Jésus. Quand celui-ci se lève et ordonne de puiser la Mère de Jésus, la gouvernante et l’Auxiliatrice a déjà préparé le terrain : faites ce qu’il vous dira. C’est elle qui donne l’ordre ; faites ; mais en réalité, le véritable ordre vient de Jésus : remplissez. Nous pouvons revoir la place de la Vierge Marie dans notre vie à partir de ce passage : Marie la majordome de ma vie avec le Christ. Cet élan spirituel permet de trouver en la Mère de Jésus, celle qui intercède, aide et prépare à ce que nous soyons plus obéissants à Jésus.
Les Apôtres, quant à eux, sont représentés portant le vin, eux qui ont vu l’eau se changer en vin, eux qui ont puisé pour remplir les jarres. Ces acteurs du Royaume, ces serviteurs-disciples sont ceux-là qui porteront le vin de l’Alliance nouvelle à tous ceux qui formeront le peuple de Dieu. Frères et sœurs, soyons non seulement des disciples qui reçoivent leur existence et leur mission de Jésus, mais soyons aussi ceux portent le vin de l’Alliance Nouvelle, devenons celles et ceux qui épandent l’ivresse de Dieu dans le monde. Soyons ceux qui porteront le vin de la nouvelle alliance dans les noces de l’Agneau que nous célébrons en chaque eucharistie.
Le troisième élément se trouve en la précision faite par Jean comme le premier des signes de Jésus. Ce point confirme toute notre lecture. Certes l’eau changée en vin est le signe, puis avec lui, nous découvrons pareillement que les sous-signes sont l’époux et l’épouse, le majordome, les serviteurs, les noces (la nouvelle Alliance) et bien sûr le vin (le sang de Jésus versé, source abondante, inépuisable et inaltérable. Ainsi toute cette réalité vécue est un signe d’une autre réalité qu’elle signifie et à laquelle les noces renvoient. Dieu vient faire alliance à son peuple, il utilise ses serviteurs pour une repas sans faute, il est l’Epoux. Sa Mère agit comme un acteur incontournable. Il va répandre son sang et faire de ce nouveau peuple un joyau, un diadème. Il accomplira la victoire sur toute chose, y compris le péché et la mort. Personne ne dira plus délaissée. Dieu dira en retour toujours mon plaisir est en elle.
Soyons cette communauté, ce peuple que Dieu s’arrange et se construit. Soyons ces disciples obéissant à sa Parole et écoutant les signes de sa Mère, notre Maman Marie. Croyons en lui, portons sa gloire et son ivresse autour de nous dans l’Eglise et au monde. Amen