par l'abbé Gad Aïna
Frères et sœurs dans le Christ,
Aujourd’hui nous célébrons la solennité du Christ Roi. La première lecture du deuxième Livre de Samuel 5,1-3 nous présente l’adoption de David comme roi de toutes les tribus d’Israël. Les
éléments qui composent l’assemblée de l’élection sont pour nous importants. Je veux en relever quelques-uns.
Le roi partage la nature et la consistance de ceux qu’il gouverne. Il est rappelé à David à cet effet : « nous sommes de tes os et de ta chair ». Cette identification au roi indique bien qu’il partage la réalité de la nature et de la vie de ceux dont il est le roi.
Ensuite, les délégués des tribus redisent à David que leur choix suit le choix de Dieu et qu’il est transversal à une royauté déjà existante. Saül était encore roi quand Dieu a consacré David par
l’onction pour qu’il soit sa part. L’élection de David, par ce rappel, introduit au cœur de notre méditation, l’opposition entre le choix social et politique de l’homme et le choix divin d’une
royauté qui vient de lui, se reçoit de lui et qui doit aboutir à lui. Dieu avait déjà donné comme signe de son choix David, et ce faisant, il l’a lui-même opposé à Saül qu’il avait ensuite
désavoué. Les anciens du peuple reprennent non seulement cette élection divine mais nous permettent de percevoir en filigrane, l’opposition latente entre un pouvoir vu du point de vue des hommes
et l’autorité reçue de Dieu pour son peuple.
Dans le propos des tribus à David et toujours en relation à l’élection , un détail non négligeable est la constitution de David comme pasteur et chef du peuple. La notion de pasteur ainsi évoquée
fait revenir notre esprit à cette évocation, la parole de Jésus dans l’évangile de Jean à la suite des annonces des prophètes vétérotestamentaires : « Je suis le bon pasteur, le vrai
berger » (Jean 10,11). Toute la logique du pasteur qui nous guide vers la vie éternelle, qui pourvoit au besoin des brebis du peuple de Dieu, rejaillit aussitôt dans ces propos projetés sur
la figure de David comme pasteur et chef du peuple de Dieu. Jésus est, comme le dit Saint Paul dans la deuxième lecture de ce jour, celui qui « nous a arrachés au pouvoir des Ténèbres, et
nous a fait passer dans le royaume du Fils bien-aimé. En lui nous sommes rachetés et pardonnés de nos péchés ». (Col 1, 13-14)
Permettez-moi de reprendre un dernier point.
La reconnaissance de l’élection divine, la consécration comme chef et pasteur, aboutissent à une alliance conclue entre les tribus et David en présence du Seigneur Dieu. Cette constante de l’alliance se vérifie également dans la personne du Verbe de Dieu et Dieu, choisi par son Père, qui devient le berger de son peuple et qui conclut avec les hommes une alliance dans laquelle il devient leur guide pour la vie éternelle, la paix et la réconciliation avec Dieu. En effet, Saint Paul dit encore : « Car il a plu à Dieu que « le tout » se retrouve en lui et que tout soit réconcilié avec Dieu grâce à lui, après que le sang de sa croix ait rétabli la paix, ce qui est sur la terre, et ce qui est dans les cieux ». (Col 1,19-20)
Le Roi Jésus est donc choisi par Dieu, consacré par lui. Son pouvoir est différent de celui des hommes. Il est chef et pasteur. Il veille sur le peuple et le fait passer dans les verts pâturages du Royaume des Cieux. Ce Roi Pasteur réconcilie le peuple avec Dieu par le sang de l’alliance qu’il verse. Il exerce ainsi sa royauté dans l’abaissement, l’humilité et le service, jusqu’à mourir sur la croix. Il est serviteur de tous afin d’attirer tous les hommes vers son Père. Dès que nous avons ainsi compris la royauté de Jésus, demandons-nous, comment à sa suite, nous pouvons régner ? Je vous propose trois lieux d’expression de la royauté du chrétien.
Pour le chrétien, le baptême confère la grâce pour devenir roi à la suite de Jésus. En effet, après le baptême, lorsque le prêtre oint le néophyte avec le Saint-Chrême, il dit au baptisé qu’il est devenu : « prêtre, prophète et roi ». Quels sont alors les lieux d’expression de la royauté du chrétien issue de la royauté du Christ ? La première application de la royauté du Christ dans sa vie est de laisser Jésus régner vraiment sur son existence. Jésus est roi quand le chrétien lui laisse toute sa place dans sa vie. Le chrétien est roi quand il sert Jésus quand, dans ses projets, ses décisions, sa prière Dieu a la première place.
Le deuxième lieu de la manifestation de la royauté du chrétien à la suite du Christ et qui vient après le règne de Dieu et donc du Christ sur sa vie, est le règne à l’image de Jésus. Jésus s’est fait humble et a servi les pauvres et les souffrants. La royauté du chrétien qui étend le règne de Jésus, actualise dans les gestes du quotidien le service des faibles, des pauvres et des souffrants. Jésus règne chaque fois que nos mains, nos cœurs et nos pieds vont au secours et à l’aide du nécessiteux.
La troisième application ou le troisième lieu de la royauté que je voulais vous proposer est : servir Jésus en manifestant partout son règne. Par-delà le service des pauvres, l’annonce de Jésus pour amener les hommes, comme Jésus l’a fait afin qu’ils entrent dans le Royaume qu’il a obtenu au prix de son sang, est une activité suprême de la manifestation du Christ Roi. Le chrétien que nous sommes, donne donc au monde le signe de la royauté de Jésus chaque fois qu’il parle de lui, ou qu’il annonce la Parole de Dieu.
Frères et sœurs, le fils de David, notre Roi et Pasteur, nous invite à l’accueillir encore plus dans nos vies, lui qui s’est fait humble pour nous sauver. En ce jour où nous célébrons son pouvoir sur toute chose, lui qui vient de Dieu et nous réconcilie à lui, prions-le de nous accorder la grâce de l’humilité pour aller vers les autres. Qu’il nous accorde le zèle, la grâce du témoignage par la Parole et les actes afin de porter ceux sa Parole. Qu’il nous procure la force d’esprit et d’âme pour œuvrer à changer notre monde en un Royaume de paix et de justice.
Le Seigneur soit avec vous !